Qui se souvient du slogan «Broadcast yourself», supposé caractériser la plate-forme collaborative YouTube? La mise en œuvre du service YouTube Red, service premium offrant un contenu “de qualité” et bloquant l’affichage des multiples encarts publicitaires, pour la somme de 9,99$/mois (l’équivalent d’un abonnement à Netflix), confirme que la plate-forme, dix ans après sa création, n’a toujours pas trouvé son modèle économique.
Figurant parmi les premières adresses consultées au monde, avec plus d’un milliard de visiteurs par mois, YouTube a navigué à vue avant de se convertir à la bonne vieille pub à l’ancienne, intrusive et parasitaire, sous la forme de clips imposés avant la consultation du contenu demandé ou de bannières en surimpression – sacré aveu d’échec pour Google, autrefois promoteur de la publicité “intelligente”, discrète et contextuelle, basée sur l’analyse des requêtes de l’internaute.
Un système élégant, mais qui n’a jamais réussi à s’imposer à une échelle permettant de concurrencer les budgets de la publicité classique. Comme les affichages personnalisés de Facebook, ces expérimentations n’ont pas tenu compte de la difficulté pour les annonceurs d’adapter leur offre à un public hyper-fragmenté. La mauvaise nouvelle, c’est que même la publicité de masse, dont les revenus ont progressé de 30% en 2014, permettant à Youtube d’atteindre les 4 milliards de dollars de chiffre d’affaire, ne suffit pas à équilibrer les frais de fonctionnement de la plate-forme. Dans l’écologie façon “longue traîne” de YouTube, trop peu de personnes sont touchées par les campagnes.
D’où la décision de réorganiser l’offre sous une forme similaire aux plates-formes de streaming payantes, avec des contenus exclusifs fournis par des Youtubeurs, et la possibilité de télécharger les vidéos pour les consulter hors connexion. Si l’on comprend bien la stratégie qui a suscité cette proposition, reste qu’elle s’installe bien tardivement dans un paysage déjà très concurrentiel. Elle constitue aussi un signal inquiétant pour les plates-formes basées sur le seul financement publicitaire, selon le modèle historique de la radio-télévision grand public. Alors que la consultation en ligne doit supporter une présence publicitaire toujours plus envahissante, la perspective d’un web “propre” accessible seulement par abonnement a de quoi refroidir les plus enthousiastes.
4 réflexions au sujet de « YouTube Red: payer pour voir des vidéos amateur? »
YouTube a un système pub assez intelligent pour de la vidéo : ils ont progressivement imposé le bouton « Skip » accessible au bout de 5 secondes. Les annonceurs ne paient que lorsque la pub est visionnée entièrement (ou au bout de 30 secondes pour les pubs longues). Ce qui les force à améliorer la qualité des pubs (YouTube affiche plus facilement les pubs qui lui feront gagner plus d’argent). C’est un système à la performance, tout comme Adwords (programme pub du moteur de recherche). Après, il est sur que les pubs vidéos sont beaucoup moins appréciés/pertinentes que les pubs Adwords.
Sur les budget de la pub classique, je serais confiant pour YouTube : ils sont idéalement placé pour les récupérer. Et être très rentable à moyen terme (simplement avec les revenus pub)
Je ne suis pas non plus inquiet pour YouTube, ni pour Google. Mais la consultation de contenus en ligne, et particulièrement de contenus vidéos, est devenue à peu près insupportable lorsqu’on ne dispose pas d’un bloqueur de pub. YT Red nous montre l’avenir: après avoir 1) attiré le public par des contenus gratuits, 2) progressivement transformés en supports de pub de masse à l’ancienne, il ne restera plus 3) qu’à payer pour garantir un accès premium à quelques sources choisies (pour ceux qui en ont les moyens). Bienvenue dans le web de demain – pas si différent que ça de Canal+…
Bien vu pour l’analogie avec Canal+ mais je n’ai pas l’impression qu’il s’agisse d’une régression pour l’internaute : les contenus vidéos payants sur le net ne remplacent les contenus vidéos gratuits, ils viennent s’ajouter à l’offre existante. Les paiements permettent de financer d’excellentes nouvelles séries cf. Netflix, Amazon, etc (très compliqué avec de la publicité de masse) et ainsi concurrencer les networks traditionnels type HBO. Sans compter que ces séries pourront également être regardées gratuitement via le piratage :)
Selon moi, le changement inquiétant est la domination globale de ces acteur, bien plus puissants et hégémoniques qu’un Canal+
Hum… Pour l’instant, YouTube n’est comparable à Netflix que par le prix… Mais Netflix a toujours été payant, et YT toujours gratuit… YT Red, c’est plutôt l’équivalent de la création de LCI par TF1. On verra si Google peut se métamorphoser en producteur – mais les contenus premiums qu’on nous annonce, ce sont plutôt des YouTubers stars comme PewDiePie que des séries comme House of Cards…
Les commentaires sont fermés.