Fisheye préfère fermer les yeux sur Gaza

Ma 62e chronique pour le magazine Fisheye ne paraîtra pas. Elle parlait du retour des images de guerre dans notre actualité, et bien sûr de Gaza. D’abord accepté par le rédacteur en chef Eric Karsenty, le texte a finalement été refusé en bloc la veille du bouclage par le directeur de publication Benoît Baume, qui estimait qu’il présentait «un point de vue extrêmement à charge contre Israël». Ce reproche confirme l’analyse que je développe dans cet article.

Arrêt sur images a publié un compte rendu par Loris Guémart de cette suppression brutale, évoquant une «censure» (pdf). Le site de critique des médias a également mis en ligne la dernière version corrigée de l’article rejeté (en accès libre). Chacun pourra donc juger de la pertinence de ce refus. L’avis des lecteurs d’Arrêt sur images y voit «une critique plutôt mesurée (…). Rien qui ne puisse justifier une telle censure.»

J’ai de mon côté décidé de mettre fin à 9 ans de collaboration avec le magazine. La plupart de ces contributions, qui discutent les principales étapes de l’évolution récente des débats sur l’image, ont été reproduites avec l’accord des éditeurs sur ce blog (sommaire). Une triste fin pour une entreprise rare d’intervention d’un chercheur spécialisé dans un support grand public, qui traduit l’«asphyxie du débat public» bien décrite par Acrimed. Je remercie chaleureusement les nombreux lecteurs et lectrices ayant témoigné leur solidarité sur les réseaux sociaux: leur soutien est précieux dans ce moment de grande amertume.

5 réflexions au sujet de « Fisheye préfère fermer les yeux sur Gaza »

  1. Merci d’avoir partagé l’article original et ce billet.

    Ce qui a motivé la censure, qui probablement n’aurait pas eu lieu en Israël, c’est la précision technique de votre analyse critique des images, qui par contraste dévoile l’indigence des media.

  2. Je viens de lire votre article sur ‘Arrêt sur images’.
    Je le trouve remarquable, particulièrement équilibré, intelligent en tous ses points – que ce soit pour ce qui concerne le fait particulier (Gaza), que ce soit pour la façon dont les processus ici à l’œuvre sont à comprendre dans la généralité de l’usage des images dans ce genre de situation.
    Merci.

  3. Votre analyse n’est pas du tout « à charge contre Israël », les faits que vous mentionnez brièvement ayant tous été publiés dans la presse Israélienne.

    Je crois que ce qui rend votre papier si corrosif c’est précisément que vous vous abstenez de donner des leçons de morale. Votre approche technique rigoureusement centrée sur l’analyse des images dévoile, nous fait sauter à la figure, la gravissime responsabilité de « l’occident global », et vous rejoignez par un chemin différent, les analyses de personnalités aussi différentes que Edward Saïd, Yeshayahu Ben Aharon, ou Marc Hatzfeld, parmi bien d’autres.

    L’argument du censeur, qui essaye dérisoirement de situer la question sur le terrain du rebattu « conflit Israélo-Palestinien », sur quoi précisément vous vous abstenez très rigoureusement d’émettre une opinion personnelle, apparaît crûment comme le piteux mensonge qu’il est, et souligne (malgré lui) l’importance de votre travail.

  4. La passion fanatique avec laquelle les dirigeants occidentaux défendent le génocide des Palestiniens vous donne raison : La source du problème est moins à Tel Aviv qu’à Londres, Paris et Washington. Coupez les subventions et la population Israélienne, pour éviter de subir le même sort, forcera son gouvernement à faire la paix en 48hr. Mais c’est nous qui ne supporterons pas cela, et comme ce ne sont pas nous qui mourrons, nous faisons tout ce que nous pouvons pour continuer. C’est ce recadrage qu’implique votre papier et qui ne vous a pas été pardonné.

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